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Du chanteur yéyé à l’actuelle icône d’une chanson française avant-gardiste, auteur, compositeur, interprète, Daniel “Christophe” Bevilacqua a traversé le paysage de la variété sans étiquettes, fricotant avec Alan Vega, Jean-Michel Jarre ou Isabelle Adjani. Revenons sur sa vie à travers une sélection de dates clés.

Daniel Bevilacqua, les débuts

Fils d’un entrepreneur en maçonnerie italien et d’une mère couturière, il est fasciné très jeune par l’American way of life, tel qu’elle est dépeinte dans les films qu’il va souvent voir au cinéma. Vers l’âge de 8 ans, Édith Piaf et Gilbert Bécaud sont ses premières idoles, bientôt supplantées par le blues, véritable révélation pour l’adolescent : il découvre Robert Johnson et surtout John Lee Hooker.

Il est parfaitement rebelle à la vie scolaire dans laquelle il s’ennuie, il va donc écumer les pensions et fréquenter pas moins d’une dizaine de lycées jusque vers ses 16 ans. À la fin des années 1950, comme bien des jeunes de sa génération (celle du baby boom de l’après-guerre), il est alors marqué par Elvis Presley et James Dean, tout en développant une passion sincère pour le rock des pionniers de la maison Sun et le blues (il reconnaîtra avoir également été influencé par Georges Brassens).

Ayant trouvé sa vocation, Daniel Bevilacqua apprend la guitare et l’harmonica.

En 1961, il fonde un groupe amateur appelé Danny Baby et les Hooligans, « Danny » étant une référence à son prénom Daniel. Il chante le plus souvent en yaourt (du faux anglais) tout en s’accompagnant à la guitare.

Après son service militaire, il entame une carrière de chanteur en solo. En 1963, il enregistre son premier 45 tours sur le label de la célèbre salle parisienne, Golf Drouot. “Reviens Sophie”, inspirée par la musique noire américaine, passe totalement inaperçu.

Christophe, l’avant-goût du succès

En 1965, il devient une vedette avec la ballade “Aline”, chronologiquement un des premiers slows de l’été en France avec le “J’entends siffler le train” de Richard Anthony. Le succès colossal de ce titre (il s’en vendra un million d’exemplaires) dont il a écrit paroles et musiques lui vaudra quelque temps plus tard un procès pour plagiat du chanteur Jacky Moulière, qui l’accuse d’avoir plagié sa chanson “La Romance”. Il perdra mais gagnera en appel à la fin des années 1970. Il sort, au même moment, “Les marionnettes” qui aura aussi un très grand succès.

Au début des années 1970, sa popularité fléchit pendant une courte période, durant laquelle il se laisse pousser une moustache qui, avec sa longue chevelure blonde, peaufinera son image de latin lover. Il rencontre Alain Bashung ; il deviennet amis et ne se quittent plus pendant quelques mois.

En 1971, Francis Dreyfus crée le label Disques Motors où sortiront désormais les albums de Christophe. Il revient dans les hit-parades avec respectivement “Mal” et “Mes Passagères” en 1971 et “Oh mon Amour”, “Main dans la main”, “Belle et Rock Monsieur” en 1972. Le déclic se produit à nouveau pour Christophe lorsque son producteur Francis Dreyfus lui adjoint les services du jeune parolier Jean Michel Jarre, avec lequel il écrit l’album “Les Paradis perdus”, très influencé par le rock anglo-saxon de l’époque (Pink Floyd, Lou Reed). L’album se classe aux premières places des ventes d’album, aux côtés de Serge Gainsbourg, devant Gérard Manset, Michel Polnareff et Jacques Dutronc.

Les plus belles années de Christophe

Le succès est à nouveau au rendez-vous, la réussite de leur association étant concrétisée en 1974 et 1975 par l’album et le 45 tours “Les Mots bleus”, un des sommets de la carrière de Christophe, qui lui permettra de renouveler son public. Il se produit alors à l’Olympia pour deux soirs à guichets fermés. Christophe a délaissé son look de jeune homme « comme il faut » des années 1960, pour revêtir la panoplie du dandy légèrement décadent chantant d’un air détaché le “Dernier des Bevilacqua” ou le tube “Señorita”. Dans un moment de dépression, il dérape alors et tombe pour une courte période dans la drogue.

En 1978, il publie un de ses albums les plus audacieux, aujourd’hui considéré comme son plus bel album “Le Beau Bizarre”, qui n’aura pas le succès de ses prédécesseurs mais lui vaudra les louanges de la critique. C’est son premier album résolument rock, sélectionné par Libération, parmi les 100 meilleurs albums de l’histoire du rock’n’roll. Les textes sont alors signés Bob Decout.

En 1983, son troisième plus gros succès en simple sera à nouveau une ballade, “Succès Fou”, dont il vend quelques 600 000 copies et qui achèvera de le cataloguer comme chanteur pour midinettes.

L’artiste culte

Par la suite, son rythme de travail ne cessera de se ralentir : il compose deux titres pour le CD de Corynne Charby (qui avait joué dans le film à succès de Francis Veber, La Chèvre), il publie un album d’adaptations de standards anglo-saxons des années 1940-1950 (Clichés d’amour), des 45 tours (“Ne raccroche pas”, qui se veut un clin-d’œil à l’adresse de la jeune Stéphanie de Monaco) mais ne fait plus de scène. Il se consacre alors essentiellement à ses collections de juke-boxes, de disques rares et de grands films. Mélomane averti, il se tient toujours au courant des dernières nouveautés, afin notamment d’actualiser sa propre musique. Perfectionniste jusqu’à la maniaquerie, il peut passer un an à travailler sur le son d’une partie de batterie.

Après un 45 tours passé à peu près inaperçu “Chiqué chiqué” en 1988, Christophe change de maison de disques en 1995. De Motors, il passe chez Epic, une division de Sony. En 1996, l’artiste fait son grand retour avec l’album « Bevilacqua », œuvre ambitieuse et révolutionnaire, disque atmosphérique qui surprendra tout le monde par sa modernité et qui marque le début de la deuxième partie de sa carrière.

Cinq ans plus tard, “Comm’Si La Terre Penchait” connaîtra toujours un superbe accueil, la critique est presque unanime, même si on est encore loin des scores de vente passés. Il annonce alors son retour sur scène (où il ne s’était pas produit depuis 26 ans) et donne une série de magnifiques concerts à l’Olympia en 2001.

En 2008, Christophe poursuit avec son inventivité permanente avec l’album “Aimer Ce Que Nous Sommes” produit par  lui-même, et Christophe Van Huffel, c’est un album plutôt expérimental sur lequel on retiendra surtout le titre “Parle-lui de moi”.

En date de fin 2009, il a vendu près de 4,7 millions d’albums au cours de sa carrière en France seulement.

 

Le début de la fin

S’ensuit, en 2016 l’album “Les Vestiges du chaos” qui est applaudi par la critique. Christophe y chante pour la seconde fois en duo avec son héros et modèle, le musicien et plasticien new-yorkais Alan Vega, du groupe Suicide.

En 2019, il enregistre et publie deux disques de reprises de son propre répertoire, en duo avec d’autres artistes : Étienne Daho, Laëtitia Casta, Eddy Mitchell, Camille, Raphaël et bien d’autres étaient au générique de “Christophe etc., vol.1 et vol 2”.

Le 16 avril 2020, à l’âge de 74 ans, Daniel “Christophe” Bevilacqua meurt d’une maladie pulmonaire aggravée par le Covid-19. Rest In Peace 

Retrouvez l’édition collector iiconi “Les Mots Bleus” de Christophe